Pourquoi Un mois sans alcool?

En ce début d’année, beaucoup décident de se passer de boissons alcoolisées durant un mois. Dry january dans une partie de l’Europe, tournée minérale en Belgique, ces périodes permettent de faire le point sur sa consommation de boissons alcoolisées, se challenger en ne consommant rien pendant un mois…mais à quoi cela sert-il ?

Le site dryjanuary.fr explique que nous sommes nombreux·ses à nous dire que l’on boit parfois un peu trop souvent ou qu’il serait bon de faire un break. Le dry january est un moyen idéal pour suspendre notre consommation et revoir notre relation à l’alcool.  Le site informe également que quelques semaines suffisent pour casser une habitude… et s’engager dans un rapport peut-être plus modéré et plus sain dans notre consommation à long terme.

Les bénéfices relevés par le site français sont « une peau fraiche et plus belle, un sommeil amélioré donc plus d’énergie, une perte de poids, une économie d’argent, une meilleure santé puisque l’arrêt durant un mois fait un bien considérable au corps et un merveilleux sentiment de victoire et de fierté ! »

En Belgique, c’est la tournée minérale de février qui est de coutume. Les mauvaises langues diront que les belges étant de grands consommateurs de boissons alcoolisées, ils ont choisi le mois de février pour les trois jours en moins par rapport au mois de janvier.

Le site tournee-minerale.be met également en évidence les bienfaits d’un mois sans alcool et s’appuie sur certaines données interpellantes pour pousser les participants à s’interroger sur leur consommation d’alcool. En effet, notre pays est un des plus gros consommateur de boissons alcoolisées en Europe. L’usage nocif d’alcool provoque 10,5% des décès dans notre pays. L’alcool est également la première cause de décès chez les 15 – 29 ans et la deuxième cause de décès évitable (après le tabac) tous âges confondus.

Il n’est plus à prouver que la consommation d’alcool est un problème de société qui a de graves conséquences sur la santé publique et les initiatives poussant les gens à ne pas boire pendant un mois sont importantes. 

Comme l’indique le site français, les bénéfices d’un mois sans alcool sont indéniables. D’un point de vue physique, économique mais n’oublions pas d’un point de vue psychologique. Rappelons tout de même que plus vous consommez d’alcool, plus les bénéfices d’une période d’abstinence se feront ressentir. Notons tout de même que ce sont rarement les personnes qui boivent quatre verres par mois qui ressentent le besoin de faire une pause. Je pense que le fait de se dire « ça va me faire du bien de lever le pied » peut déjà être un indicateur sur la nécessité de revoir sa consommation d’alcool à la baisse.

L’Organisation Mondiale de la Santé préconise une consommation maximale de 3 verres de boisson alcoolisée par jours pour les hommes et 2 pour les femmes, avec un maximum donc de 21 verres par semaine pour les uns et 14 pour les autres. L’organisation recommande également au moins un jour d’abstinence par semaine.

Cette norme journalière est la quantité maximale qui est métabolisable par votre foie, chaque jour. Si vous buvez plus, le foie ne fait plus son boulot et l’éthanol pur se balade librement dans tout votre corps, provoquant déjà des dégâts sur vos cellules.

Les spécialistes recommandent également de ne jamais dépasser les six unités par occasion et ce pour éviter des dommages directs sur le corps, entre autre au niveau cérébrale, nerveux…et bien entendu ailleurs…

Un verre de boisson alcoolisée (une unité) est un verre contenant 10gr d’alcool pur. Il s’agit de 25 cl de bière à 5,2% (pils), 10cl de vin à 12,5% ou 3cl d’alcool à 40%. C’est ce qu’on appelle la norme HORECA. Il n’est pas ici question des bières spéciales dont le degré d’alcool est assez variable, ni des vins titrant à plus de 12,5%. On estime qu’une bière spéciale représente entre 1,5 et 2 verres, par rapport à la norme HORECA. L’idée de cette norme est de pouvoir se situer dans sa consommation en utilisant les mêmes références. 

L’objectif d’un mois sans alcool est donc un impact positif physique…mais pas uniquement !

Cette période d’abstinence peut permettre de constater ce qui change dans un quotidien sans alcool et d’en souligner le côté bénéfique. Il est aussi important de se rendre compte que l’absence d’alcool n’a souvent pas les effets tant redoutés.

Cela peut aussi permettre de souligner un mode de consommation par habitude voire même par automatisme. 

On revient parfois du travail et on se retrouve avec une bière ou un verre de vin en main, sans vraiment avoir fait attention. Certains automatismes se créent et notre consommation devient alors tout à fait machinale. Il n’y a alors plus vraiment d’occasion pour boire un verre, si ce n’est se « récompenser » pour une bonne journée de travail ou pour se « réconforter » d’une journée de merde. 

En fait, il y a toujours un bon prétexte pour boire qu’il soit positif ou négatif. 

Ces rituels que nous développons vont nous donner l’impression d’être positifs pour notre bien-être mais c’est un leurre provoqué par une modification de notre système de récompense. Avec le temps, l’alcool, associé par notre cerveau comme quelque chose de positif, va provoquer une libération de dopamine entrainant un état de bien être temporaire. Cette libération n’est, en général, effective que lors de la première gorgée de boisson alcoolisée et c’est pour cela qu’on pense que cela nous fait du bien.

N’oubliez jamais que votre cerveau est fainéant et ira toujours vers ce qu’il connait déjà, vers des comportements qui seront sans surprise pour lui. Notre cerveau choisira toujours un chemin qu’il connait déjà. Même s’il est plus long, plus dangereux ou en mauvais état, il le choisira toujours à l’inconnu. C’est un réflexe primitif. 

« Ne va pas dans le noir, tu ne sais pas ce qui t’y attend ! »  

« Tu as l’habitude de prendre un verre en rentrant le soir, continue et ne fais pas face à tes émotions ou tes angoisses ! »

 

« Je n’ai pas de soucis avec l’alcool ! Je tiens un mois sans problème ! »

Cette phrase, je l’ai entendue des centaines de fois. Elle est souvent dite par des personnes qui tiennent le coup un mois durant et qui a chaque week-end passé sans boire se dise « Allez, plus que trois ! » Ou deux…ou un…et une fois arrivée l’échéance qu’ils attendent comme une délivrance, ils se collent une murge comme ça faisait plus de deux mois qu’il ne s’était plus prise.

Vous saisissez où je veux arriver ? Qu’est-ce qui cloche pour vous dans ce qui précède ?

« Je n’ai aucun problème de consommation d’alcool mis à part que je souhaite me challenger pour me prouver que même si je bois en général beaucoup trop, j’arrive à me retenir pendant un mois et quand j’aurai fini, je pourrai recommencer comme d’habitude, ma conscience apaisée ! »

Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. L’intérêt d’un mois sans alcool est bel et bien réel mais il doit être suivi d’effets. Il doit être le point de départ d’une prise de conscience sur nos mauvaises habitudes. Pas une espèce d’alibi à brandir en mode : « Je n’ai pas de problème de consommation d’alcool, je fais chaque année la tournée minérale ! »

 

Mais comment faire pour que ce mois sans alcool vous soit utile ?

Analyser ce que vous ressentez. Comment vous sentez-vous sans boire ? Que provoque chez vous l’absence d’alcool ? Quelles pensées vous accompagnent lorsque vous vous retrouvez avec des gens qui boivent et pas vous ? Que vous font les réflexions des autres ? Trouvez-vous ça normal ? Quand une envie d’alcool survient, dans quelles circonstances est-ce ? Comment vous sentez vous lorsque vous vous privez d’alcool malgré l’envie de boire ? Quel sentiment vous habite le lendemain d’une soirée passée sans boire ? Qu’est-ce que cette sobriété temporaire vous apporte-t-elle ?

L’idée est de prendre conscience des points positifs de votre non consommation mais aussi des points négatifs de votre consommation habituelle. Bien entendu, il peut ne pas y avoir de points négatifs dans votre consommation de boissons alcoolisées…et tant mieux ! 

Une fois de plus, je ne suis pas un apôtre du zéro alcool. 

J’essaie surtout d’éveiller la conscience des gens au fait d’être attentif à la manière dont ils consomment pour être capables, en cas de nécessité, de détecter un problème et d’ajuster certains comportements. L’abstinence est une arme redoutable quand on a totalement perdu le contrôle mais n’est pas systématiquement nécessaire. Changer ses habitudes, comprendre ses modes de fonctionnement, savoir détecter à quels moments on a plus envie de boire et quel est alors le rôle de l’alcool…ce sont des pistes nécessaires pour se connaitre et prendre conscience de sa consommation.

Prendre conscience de nos comportements et habitudes est une des clés. Il faut avoir la lucidité d’admettre que notre fonctionnement, s’il n’est pas positif pour nous, doit être modifié. Nous devons décider de ne pas nous laisser guider par des automatismes qui nous poussent à boire mais décider si oui ou non nous consommons une boissons alcoolisées, sans tenir compte des circonstances dans lesquelles nous nous trouvons. 

Combien de fois n’ai-je pas entendu : « On ne refuse pas un verre de champagne ! », « Dans le business, on n’a pas le choix, on doit boire ! », « J’étais à un mariage, je n’allais pas boire de l’eau ! »…etc…etc…etc… Toutes ces phrases sont des prétextes pour valider notre consommation mais aussi des habitudes hors desquelles notre cerveau est très mal à l’aise. Il nous poussera une fois de plus en terrain connu et donc à consommer de l’alcool dans ces circonstances dans lesquelles nous en avons l’habitude. Alors que parfois, nous n’en avons même pas envie, ces habitudes nous poussent à accepter certains verres. Il faut alors prendre conscience de ce manque d’envie et dire à notre cerveau que nous ne risquons rien en ne consommant pas de boisson alcoolisée. Nous devons le rééduquer au fait que nous n’avons pas besoin de ce produit pour passer un bon moment. Et très honnêtement, si c’est le cas pour vous, si l’alcool est nécessaire pour profiter du moment présent, c’est que vous n’êtes pas au bon endroit ou en tout cas pas avec les bonnes personnes ! 

 

A la fin de votre mois sans alcool, posez-vous ces quelques questions :

-       Ai-je eu du mal à ne pas boire ?

-       Suis-je impatient que cela se termine ?

-       Le jour de la fin du défi, vais-je sauter sur ma bouteille favorite ?

 

Si la réponse est non à toutes ces questions, demandez-vous ceci :

-       Est-ce que je me sens mieux, à quelque niveau que ce soit, par rapport au début de ma période de sobriété ?

-       Pourrais-je prolonger cette période d’abstinence pour le plaisir ?

-       Est-ce que cette prolongation pourrait améliorer la manière dont je me sens ?

-       Vais-je changer mes habitudes de consommation de boissons alcoolisées en diminuant les quantités et/ou la fréquence à laquelle j’en bois ?

Si la réponse est oui à une seule de ces questions, votre mois sans alcool vous a été très utile !

« Hop hop hop, et si j’ai répondu oui aux premières questions et non aux suivantes ? »

A ce moment-là, à vous de voir si vous considérez votre consommation comme problématique. Si non, c’est qu’il n’y a rien à faire pour le moment. 

Si par contre vous estimez que vous buvez trop et que cela devient, ou peut devenir, un problème, prenez contact avec un spécialiste qui va pouvoir vous aider. 

N’oubliez jamais qu’il est beaucoup plus difficile de gérer un problème de consommation seul et qu’un spécialiste vous fera très souvent gagner un temps précieux !

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